Simone N....... - 1917 Copie générale 39/45: Rue Adolphe Brunaud - Saintes
Carrière: Mon époux avait été fait prisonnier le 10/5/1940 et je n'ai eu de ses nouvelles que 3 mois après.
A cette époque j'avais d'abord été standardiste à la poste, puis j'avais passé un petit concours pour rentrer à la SNCF. J'avais été prise aussitôt. En ce temps-là j'avais quand même une formation d'institutrice.
1 Débâcle juin 1940 - Etats-majors en Saintonge
J'avais su le départ des états-majors français, du fait de l'approche des allemands, à environ 10 kilomètres de Saintes. En effet j'étais au téléphone à la Poste. En dernier temps à la Poste j'avais un capitaine français à mes côtés, j'ai quitté ce poste à l'arrivée des Allemands.
2 Arrivée des Allemands à Saintes
Un après-midi j'allais avec mon frère aux " Galeries " (Futures Galeries Lafayette) et nous étions sur le cours quand nous avons vu arriver des Allemands, principalement un tank venant du pont, il y a avait un soldat, vêtu de noir, qui se tenait debout, très droit dans la tourelle. Le tank avait monté lentement le cours national. Il faisait très chaud ce jour-là, nous étions sidérés.
Des officiers supérieurs allemands avaient aussi logé au château Rouyer Guillet, rue de Laroche. Un peu plus tard, un wagon spécial était garé en bout de la gare pour recevoir des dames.
3 Bombardement de Saintes - 14/8/1944
Je travaillais au service de la " Voie " à la SNCF et j'étais au bureau d'études, salle du dessin et notre fenêtre donnait directement sur la grille d'entrée de la cour. Comme j'étais en relation avec les villes voisines, celle de St Jean d'Angély m'a téléphoné pour m'avertir qu'une escadrille d'avions arrivait sur Saintes. Je m'étais préparée et j'avais alors descendu les marches quatre à quatre, me dirigeant vers le souterrain. J'avais alors traversé la rue devant le café et, de là au coin de l'avenue j'ai vu la première bombe, l'avion passant au-dessus de la gare, qui allait tomber sur le deuxième souterrain (Au bout de la rue St Pallais). A son explosion les feuilles des tilleuls soufflées ont passé au dessus de moi.
4 Mitraillages SNCF - Triage
Depuis le bureau de notre 3ième étage, on voyait bien les avions qui passaient à la hauteur des fenêtres, dans ces instants on se planquait sous les bureaux à dessin.
5 Mitraillage des citernes d'hydrocarbure de l'Epineuil
Je me trouvais à l'arrondissement (Les grands bureaux) où je travaillais et j'avais vu les avions descendre sur les citernes, vers la route de Chaniers. Je voyais bien la scène par la fenêtre et c'est ainsi que j'ai vu brûler les citernes, tout au moins elles fumaient. Au cours de cette attaque les D.C.A avaient tiré.
6 Les administratifs SNCF au château Rouyer Guillet " Rochemont "
Après le premier bombardement, des administratifs SNCF s'étaient déplacés au château Rouyer Guillet de la route de St Jean, moi j'étais restée sur place. A cours du bombardement du 14 août une bombe était tombée à proximité de ce château de Rochemont.
7 D.C.A sur les grands bureaux - Arrondissement
Bien avant les bombardements les Allemands avaient pratiqué une ouverture dans le toit de cet immeuble et ils y avaient installé une arme anti-aérienne. Quand je me rendais aux archives je pouvais voir le soldat de service à son poste D.C.A.
8 Bombardement de Saintes - 24/6/1944
Le lendemain du bombardement, arrivant de mon domicile, rue Adolphe Brunaud, je voulais me rendre aux grands-bureaux, mais voulant passer par l'avenue Gambetta, je m'étais rendue compte qu'elle était bloquée. Il y avait des nuages de poussière partout, en effet une bombe était tombée avenue Gambetta vers le libraire (Carrefour avec rue du pérat). Aussi j'étais alors passée par la rue du pérat et arrivée devant l'hôtel " Le Chalet " je pouvais constater que la gare n'avais pas été touchée.
J'ai su que les Français et les allemands, ceux qui l'avaient pu, s'étaient réfugiés dans le blockhaus sur la place. Dans celui-ci les Allemands ne voulaient pas trop y séjourner car les bombes le secouaient trop.
C'est là que j'avais aperçu des dizaines de soldats allemands étendus sous les tilleuls, entre l'hôtel " Le Chalet " et le blockhaus. Ces soldats avaient été tués dans un train qui était parti de nuit pour se mettre à l'abri sous le tunnel de Lormont. Mais le train avait été en parti bombardé.
Après ce premier bombardement, et dans la foulée, les Anglais sont revenus lâcher des bombes rue du général Sarrail sur les services allemands (Kommandantur... ! M.S). Des hommes de troupe, qui logeaient dans un petit bâtiment (en 1993... entrée de l'école Emile Combes) avaient aussi tiré avec leurs armes anti-aérienne. Ces soldats ont été tués par cette bombe, ainsi qu'une maison en face, tuant alors deux civils saintais.
Une autre bombe était aussi tombée cours national, face à la maison Musso. Ils avaient certainement voulu détruire le central téléphonique de la place du bastion, ainsi que les bureaux de la Gestapo qui se trouvaient en face de la Banque de France... ! Une autre bombe était tombée dans le jardin des " Petites sœurs des pauvres ", rue Albin Delage.
Des gens de la rue de Taillebourg s'étaient sauvés dans la prairie côté Charente. Ce bombardement a fait une trentaine de morts
Puis je suis allée aux grands-bureaux et c'est là que depuis le second étage j'avais pu constater les destructions sur le dépôt et la gare de triage. Dans ces bureaux, les services administratifs français étaient au rez-de-chaussée et les Allemands occupaient le 1er étage.
Ce bombardement avait duré 20 minutes environ.
Dans les jours qui ont suivi il y a eu une cérémonie à l'hôpital pour les morts français.
Suite à ce bombardement il a été trouvés 1700 impacts (...!! M.S) de bombes, dont certaines n'avaient pas explosé. Pour le déminage les allemands ont fait venir des prisonniers politiques depuis Poiters. Ils avaient alors travaillé au déminage sous la garde des miliciens de Pétain et heureusement il n'y a pas eu d'accident.
9 Réquisition logement de ma famille - Germaine Mouldou
a) Mon oncle et ma tante, Mouldou, demeuraient rue Albin Delage, dans la belle maison au coin de la rue de la boule. Des soldats allemands y avaient été logés, ils étaient très mal élevés, ces hommes se procuraient des œufs à la campagne. Puis il y a eu un capitaine allemand, il avait été préfet de Munich, un homme pas du tout nazi et très ennuyé de la situation. Son ordonnance venait tous les jours, c'était pour une question de charbon. Cet officier, qui avait deux petites filles, s'est fait tué en Russie.
b) Rue de la boule, un logement avait aussi été réquisitionné pour un collaborateur qui a été fusillé (sommairement ou officiellement..... M.S) par les F.F.I. Il avait été chef d'un réseau Told à Royan, puis à Saintes (Voir " Doc généralités " n° 119 - Nithard - M.S).
10 Interprète langue allemande à la SNCF - Alsacien Meder
Réquisitionné par les Allemands pour servir d'interprète à la SNCF, il s'appelait Meder et était Alsacien.
11 Poste et résistance SNCF
Un poste radio était dissimulé dans un endroit creusé sous le poste d'aiguillage situé à droite du passage souterrain Gambetta, en arrivant par l'avenue Gambetta.
12 Bombardement de Royan - Incertain..
Un matin on voyait de la fumée en direction de la côte, c'était la forêt de La Coubre qui brûlait.
13 Des Allemands à la COOP - Avant le 4/9/44
A la COOP, à l'angle de la rue E.Delaunay et du cours Lemercier, un matin vers les 10 heures j'étais venue chercher mon lait. Deux camions allemands sont arrivés, ils venaient de Royan...!, puis des hommes ont embarqué des provisions à bord et ils sont repartis.
14 Départ des Allemands de la caserne Brémond d'Ars
Les soldats allemands qui occupaient la caserne (futur collège) ont quitté définitivement l'établissement à 4 heures du matin.
Aussitôt leur départ le voisinage est venu à la caserne pour se servir. En effet les Allemands avaient laissé beaucoup d'équipement. C'es ce jour-là que des F.F.I sont arrivés.
15 Combat de Saintes - 4/9/1944
Affecté au dossier " Combat de libération - Saintes "
16 Rendez-vous galants dans des wagons SNCF (Voir aussi 2)
Les équipes de nuit m'avaient dit ce qui suit... " Au triage, du côté de la COOP (Grand bâtiment), il y avait un ou deux trains et des officiers y logeaient. Le soir des " Belles dames " de Saintes, des bourgeoises, se rendaient dans ce train. Il y avait, entre autres, madame D....... " (Certainement citée en dossier " Epuration "... M.S)
17 Interpellation par des hommes cours national
C'était un 1er mai, en 1943 ou 1944...! Cette journée il avait fait beau, je partais à mon travail, quittant mon domicile à 7 h 30 du matin. Sur mon parcours je m'arrêtais au boulanger pour acheter mon alimentation, puis je continuais ma route en vélo. Je portais au bras le brassard rouge et vert de la SNCF, il me permettait de circuler à toute heure.
Les rues étaient désertes, mais quand j'étais arrivée au coin du square, par la rue du général Sarrail, j'ai vu arriver sur ma droite une voiture noire, c'était une " Traction avant ", elle descendait lentement le cours. J'ai alors tourné à gauche et je me suis mise sur ma droite. Ce n'était pas la Gestapo de Saintes car je connaissais les hommes. Je continuais alors ma route, mais la voiture avait commencé à me serrer et à me bloquer le long du trottoir et jusqu'au café Palissy (Face à la poste en 1995).
Dans la voiture il y avait trois hommes avec des chapeaux, l'un au volant, un autre à côté et le troisième derrière.
J'avais sur moi un petit papier de soie, avec dessus des lignes dont j'ignorais le contenu, je devais le remettre à des gens du Douhet. Ce message était dans la doublure de ma veste.
Deux hommes sont descendus, l'un se mettant derrière moi et l'autre me questionnait en français.
Police: " Que faites-vous là...! Vous n'avez pas le droit "
Moi: " Si. Je regrette car je suis de service à la SNCF "
Police: " Ah! Bon. Vous travaillez à la SNCF. Vous êtes toute seule, êtes-vous mariée ? "
Moi: " Oui "
Police: " Votre mari il est où ? "
Moi: " Il est prisonnier de guerre depuis le 10 mai 1940 "
... Le ton a alors changé....
Police: " Où travaillez-vous à la SNCF...? "
Moi: " Aux grands-bureaux là-haut "
Police: " Oui nous connaissons. Vous faites quoi ? "
Moi: " Je travaille au dessin "
..... J'avais envie de rire, car le garçon de café, qui résidait rue Victor Hugo, mettant ses chaises à sa terrasse, était resté planté... sidéré. Plus tard il m'avait avoué avoir eu peur. Puis un homme a remonté dans sa voiture, j'ai eu peur. Les hommes avaient alors parlé en allemand, ils s'étaient regardés et le type qui était derrière moi était remonté à l'arrière. Puis la voiture est repartie à vive allure. je n'ai eu une réaction que par la suite.
Puis j'avais pris mon vélo et m'était alors rendue à mon boulot. Arrivée sur place, je m'étais assise et je n'avais plus de jambes.
Plus tard j'ai remis le message à un résistant, M. H...... (!) du Douhet. Cet homme n'était pas originaire de Saintes, il est décédé en 1995.
Note: Certainement des inspecteurs de la Sureté nationale, comme étaient appelés les inspecteurs du commissariat de police à cette époque. Commissariat place du cloître, rue Cuvilliers en 39/45.
Saisie du 5/6/2020