Qui veut la peau du colonel Méchain...?
Méchain Jean-Michel .. Immersion en carrière brisée.....
Natif de St Jean d’Angély en 1953 Jean-Michel Méchain ne pensait
pas qu’un jour « grandeur de la France et stratégie politicienne ne feraient pas bon ménage.
Après un temps à Saintes, il a quitté cette ville alors qu’il
avait 17 ans. Son cheminement fut très orienté, ainsi ce fut le scoutisme, les enfants de troupe, puis la mythique institution qu’est l’école des Saint-Cyriens. De sa promotion de Saint-Cyr il
est sorti le 8ième sur 240 ce qui l’a autorisé à choisir son affectation. Ainsi, il sortait d’option sciences, il avait choisi la gendarmerie.
Issu d’une famille d’officier, il avait certainement été influencé par le métier des armes, plus
dans le sens de l’engagement que dans celui de vouloir se battre à tout prix. D’ailleurs un de ses oncles lui avait dit… « Les aventures coloniales sont terminées, prend la gendarmerie, sers
la France ».
« Tout cela est évident, c’est ainsi que je me suis
retrouvé, jeune lieutenant, avec 30 gars sous mes ordres, dont certains beaucoup plus âgés que moi. Je suis alors parti à la découverte de la montagne, en plein dans le monde du ski, j’étais à
Dignes en escadron de gendarmerie mobile. Là ce fut formidable comme expérience, la montagne est quelque chose de puissant, elle nous capte. Puis dans ce milieu des liens fors se tissent entre
les hommes ».
Pour en revenir à vous comme écrivain, est-ce-que – Qui veut la
peau du colonel - est votre premier livre ?
« Comme livre grande littérature, c’est mon premier
ouvrage. J’avais déjà écrit sur le thème de l’histoire et de l’archéologie, le titre était – Le serment d’Agonnay et la chapelle de Pied Gautru -. C’est un document qui parle de faits et d’un
site en Saintonge. En fait je n’avais jamais pensé écrire un livre, ceci jusqu’à mon passage au Kosovo, c’était en 1999. Mais l’élément déclencheur de mes ennuis ce sera en mars 2000, là tout va
basculer ».
C'est-à-dire, sans vouloir défrayer votre livre / document
biographique, que s’est-il passé au Kosovo ?
« J’étais conseiller juridique auprès du général
commandant la KFOR au Kosovo. Dans cette région j’avais de grande responsabilité, ainsi contact fréquent avec Bernard Kouchner, mais aussi je travaillais sur des opérations d renseignement comme
officier traitant. J’avais aussi des missions à effectuer sur certains points, voire aussi sur des hommes. Ainsi j’avais eu à travailler sur les mafias au Kosovo, ceci à la demande de B.
Kouchner, d’ailleurs cet homme politique avait demandé au ministre de la défense que le colonel Méchain reste auprès de lui, la réponse avait était positive »
Jusque là votre parcours semblait
favorable… ?
« Justement non, car à partir de ce moment un montage va être
fait contre moi pour que je ne sois pas conseiller spécial. Moi je crois que j’ai été victime d’un conflit interarmes, en fait entre l’armée de terre et la gendarmerie. L’intervention
française au Kosovo était mal préparée, nous n’étions pas prêts pour ce genre d’action. Ce n’était pas à l’armée de se retrouver sur le terrain il aurait mieux valu envoyer seulement la
gendarmerie, nous n’étions quand même pas en guerre. Mais je pense aussi que mes graves déboires sont le fait d’une seconde raison. A cette époque c’était la cohabitation à la tête de l’état en
France. Jacques en était le Président de la république (RPR) et Lionel Jospin (PS) était son Premier ministre. Cette situation, conflictuelle voire instable, avait d’importantes répercussions sur
ce que nous devions faire au Kosovo ».
En présentation de votre livre il est dit que vous avez fait un
séjour à la prison « La santé », alors juste pour donner envie aux lecteurs de parcourir vos pages… ?
« J’ai été emprisonné, mais rien ne fut facile pour eux,
enfin pour ceux qui m’en voulaient. J’étais leur cible, pris en filature, mais j’avais retourné la situation et c’est moi qui en ai pris un en filature et là tout a dégénéré. Arrestation de
ce groupe d’hommes et ensuite ce fut l’engrenage. Ces hommes étaient, ce que l’on appelle dans notre jargon, des chaussures à clous. La DST m’avait retrouvé quelques temps plus tard…. Même
un coup de téléphone à Saintes pour me nuire et me déstabiliser…. ».
Votre livre tente alors de percer les secrets de la « grande
muette » et quelque-part vous réhabilité moralement, même si un non –lieu avait été prononcé contre vous ?
« Oui mais c’est ainsi que ma carrière fut brisée. Même
si, en dehors du Kosovo, j’ai travaillé sur de grands dossiers qui concernaient la Police nationale, voire le rapprochement des grades gendarmerie / police. Dans le sens qu’un inspecteur était
alors un lieutenant, etc.…. En fait la loi du 31/1/1995. Toujours sur la dualité gendarmerie / police, je ne suis pas spécialement pour la fonte des deux corps en une seule
force ».
Monsieur Méchain, avant de vous renvoyer dans vos foyers, mais
dans le bon sens du terme, avez-vous une devise ?
« Nun contra recedel, ce qui signifie… Ne recule pas. Mais aussi –
L’obéissance est une vertu qui ne s’accorde pas avec le mépris »
Merci pour cet entretien et nous vous souhaitons de nombreux lecteurs pour votre livre qui est
sorti en octobre aux éditions Gallimard « La table ronde ». En collaboration avec Hervé Prudon.
4ième de couverture…….
« Officier de classe exceptionnelle [...] cultivé et incisif, il s'est vu confier des responsabilités
sans cesse élargies et a été un élément fondamental de l'influence de la France au Kosovo.»
Note du général de division Jean-Claude Thomann, 5 janvier 2000.
Moins de trois mois plus tard, accusé d'avoir divulgué des documents classés confidentiel-défense, le colonel de gendarmerie Jean-Michel Méchain est passé à tabac en pleine rue, puis écroué à la
prison de la Santé. Sa carrière exemplaire, de Chamonix à Pristina en passant par Beyrouth, est brisée. Malgré un non-lieu prononcé en juin 2007, il n'obtiendra ni de la justice ni de sa
hiérarchie d'être réhabilité. Longtemps réduit au silence par l'obligation de réserve, Jean-Michel Méchain est désormais libre de s'exprimer. Tout en évoquant la mort programmée de la
gendarmerie, Qui veut ta peau du colonel ? Retrace l'ascension brillante et la longue descente aux enfers d'un homme dont l'idéal d'engagement et de sacrifice a été piétiné.
Jean-Michel Méchain, qui a quitté la gendarmerie en mars 2011, vit aujourd'hui à Saintes, en Charente-Maritime.
Image Charentaise.... La crue à Saintes
Passerelle.. Effet miroir de bord à bord.