Bombardement Saintes
14 août 1944
" Ginette Buferme, parmi d'autres, une résistante sous les bombes américaines "
Il y a quelques jours la France mettait en terre une grande Dame, Simone Veil, pour son vécu, ses valeurs et ses engagements. A Saintes le 7 juillet était inhumé à Saintes Ginette Bufferme, humble résistante mais avec des hauts risques, cette dame avait assisté au cours d’un repas familial à l’arrestation de son cousin Roger Guintard qui sera fusillé à Poitiers, elle avait échappé à la mort quand sa maison avait été bombardé en août 1944, enfin elle avait été gravement blessée au cours d’un mitraillage aérien en juillet de cette même année. Mises en terre de France dans les mêmes heures, elles s’inscrivent tout à fait dans la belle phrase du président de la république Emmanuel Macron prononcée à Ouradour sur Glane…
« La mémoire, elle aussi, forcément s’érode. Ce qui se transmet risque de s’affadir, sans cesse nous devons raviver la flamme et lui redonner sens »
Déclarations de Mme Ginette Buferme, en date du 26/12/1984
► Document en vue d’obtention de reconnaissance de sa qualité d’agent de liaison au groupe « Navarre », dépendant de l’O.C.M
Elle avait pour chefs : Marcel Coutinot, Louis Bastard, Vignaud, Roger Moyet, Yves Lecourtois, Baillargé R.
Copie de cette demande : Etablie le 18 août 2007 - MS
« J’ai commencé à travailler à la Sous-préfecture de Saintes le 23/10/1939. J’y ai rencontré tout de suite le commissaire de Police Paul Mamert (fusillé à Bordeaux), avec qui j’avais eu très tôt des contacts pour la résistance. Il me chargeait d’aller « porter » divers renseignements chez d’autres résistants. Il m’appelait « petite ». M. Marcel Coutinot aussi m’appelait ainsi. Avec Paul Mamert nous étions déjà prêts, avec d’autres, pour cet appel du 18 juin. Vers 1942/43 il a été nommé au commissariat de Bordeaux, où il a été arrêté, puis emprisonné au fort du Hâ, puis déporté dans un camp où il est mort.
J’ai eu aussi des contacts avec maître Philippe Bonne, avocat à Saintes, qui, par deux fois, a évité que je sois arrêtée. Dont une fois que la milice était entrée au café des colonnes, sur le cours national à Saintes et avait arrêté des camarades, des résistants. Cet acte devait se situer en février 1941, plusieurs personnes ont ainsi été arrêtées et emprisonnées. Il m’avait reconduit très discrètement jusqu’à chez moi, après m’avoir dit de partir de là, qu’il y en avait assez qui venaient d’être arrêtés. Cet homme a été arrêté le 9 février 1942 et il est mort en déportation le 8 avril 1945.
, employé à Roger Quintard (décédé depuis) qui avait été arrêté et torturé. Avec mon cousin Jacques Dassonville. Cette journée ( !) il y avait aussi René Barréqui travaillait aux ponts et chaussées de Saintes, cet homme a été tué par les allemands le 24 août 1944, en même temps que Pierre Geoffroy qui travaillait à la coopérative agricole de Saintes, avec Jean Michaud. Avec André Joubert est décédé depuis, ainsi que Marcel Guillot pour les services qu’il leur rendait. Marcel Coutinot, boulanger à Migron, qui aidait beaucoup les maquisards et qui connaissait André Joubert (ancien Maire de Saintes), qui de temps en temps était « obligé » d’aller se « reposer ». Il allait alors habiter chez mon cousin Marcel GuillotDes contacts aussi avec la SNCF, il sabotait les lignes de chemin de fer, faisait sauter les locomotives. Ils avaient un dépôt d’armes assez important dans son jardin au Champboudeau à Saintes. Mon cousin a été arrêté début février 1944, emprisonné, torturé et fusillé. Fusillé à Poitiers en avril 1944. Lorsque les allemands étaient venus l’arrêter chez lui, je m’y trouvais avec ma mère. Il y avait en tête des allemands, l’inspecteur de la police des chemins de fer Penaud. Ma grand-mère maternelle, Marguerite Martinaud, qui habitait St Sauvant en Chte Mme, cachait chez elle des tracts, puis elle portait ses petits paquets là où il fallait. Elle le faisait pour M. Dantz ( !) qui habitait St Sauvant. Cet homme a été porté disparu. Un rapport avait été adressé à la Sous-préfecture de Saintes où j’étais encore en service. La Feldgendarmerie avait été perquisitionné chez elle, mais n’avait réussi à trouver que des journaux quelconques. Ma grand-mère les avait discrètement éloignés de l’endroit où se trouvaient les tracts.
J’ai donc rencontré André Grisey, Guy Cassou de St Mathurin (Tués aux Pinarderies le 15 août 1944) et Paul Bouffard (tué à Château Gaillard le 15 août 1944).
Renvoyée de la Sous-préfecture de Saint Jean d’Angély par le Sous-préfet en fonction (P…. de C….. – Collaborateur), après le débarquement, je suis allée habiter chez mon cousin André Joubert à Migron.
. Des avions canadiens parachutaient des réservoirs d’essence au-dessus du camp d’aviation de Fontenet, à proximité. Nous nous rendions au camp des Mazeray où s’étaient regroupés les maquisards après la destruction de Château Gaillard. Ainsi nous nous sommes arrêtés, la première fusée (bleu-blanc-rouge) s’était enrayée, c’est ainsi que nous avons reçu une première rafale de balles explosives. L’avion piquait une seconde fois quand la deuxième fusée est partie. Il est alors remonté, a tourné au-dessus de nous puis il est reparti. L’accident a été annoncé le lendemain à R.Moyet, Y.Lecourtois,R.Baillargé nous mettions au point le prochain contact (lieu et heure), ceci jusqu’au 27 août 1944 où je fus blessé à Chagnon d’Aumagne, avec moi il y avait Roger Moyet qui étaient au maquis. Avec R.Baillargé (La rafale) et Yves Lecourtois(Cécile) pour donner des renseignements sur les mouvements des troupes allemandes. Ainsi que Brissonneau (Toto), chef des « Corps francs » au café Roger MoyetJe rencontrais la BBC. C’est un FFI qui est venu nous le dire à l’hôpital de St Jean d’Angély où nous avions été transportées en ambulance le lundi matin 28 août et opérées.
Nous avions été gardées et soignées toute la nuit chez M. et Mme Cerpeau habitant à Chagnon d’Aumagne. Pendant notre séjour à l’hôpital de St Jean, nous avons été gardées jour et nuit par un FFI ou un maquisard armé de sa mitraillette.
A notre sortie je suis revenue habiter chez mon cousin André Joubert à Migron. C’est le docteur Grand ( !) de Brizambourg qui venait tous les jours nous faire nos soins.
J’appartenais comme le commissaire de police Paul Mamert au réseau Navarre. »
Le 26 décembre 1984 signé : G.Buferme
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De par ma fonction à la Sous-préfecture, j’étais au contact permanent avec la Kommandantur, rue du général Sarrail (Saintes), ce qui m’a permis d’être au courant de certains projets d’opérations, jusqu’au jour où je me suis fait prendre par la sentinelle de service, j’écoutais en marchant très doucement dans le couloir ce qui se disait dans le bureau d’un grand chef. J’ai été ramené brutalement devant le bureau où j’avais à remettre des papiers. Je n’ai pu retourner par la suite à la kommandantur, mais je pouvais continuer à écouter ce qui se disait dans le bureau du sous-préfet, quand les allemands ou les miliciens venaient le voir. Il y avait un couloir avec de grands placards qui menait du bureau du secrétaire général au bureau du Sous-préfet. Ainsi je pouvais donc écouter avec prudence quand même en cas de sortie impromptue, ce qui arrivait quelquefois (et me cacher) quand les tons montaient, que les personnes qui parlaient ne s’entendaient pas sur le sujet.
J’étais suivie tous les jours par « Henri » (Chef Gestapo Saintes), responsable du service espionnage (De MS : Gestapo) et qui habitait près de mon domicile. C’est Marcel Coutinot qui le savait qui m’avait indiqué son nom.
Ce qui m’a mis dans l’obligation de demander une mutation à la Sous-préfecture de St Jean d’Angély le 21 février 1944. A mon arrivée à St Jean j’ai pris contact avec Vignaud (Au commissariat de Police) qui m’a donné la filière pour rester en contact avec le maquis.
Saintes le 26 décembre 1984 signé : G.Buferme